mardi 23 avril 2013

Billet N°1 : Gouvernance et démocratie interne des partis politiques au Mali



La démocratie malienne mal en point depuis les partis politiques donnera difficilement un pouvoir démocratique aux maliens. Les principaux animateurs de la scène politique sont les partis or leur gestion et surtout le mode de désignation des responsables à certains postes de mission hautement stratégique tant pour le parti que pour le pays est souvent des plus opaques. Il y a certes des élections pour animer les différents organes des partis, mais la gestion d’ensemble est plutôt de type patrimonial. A quelques exceptions près les partis sont plus des instruments aux mains et au service d’un leader. Alors les choix qui devraient être faits sur une base transparente ont tout l’air d’un montage qui cache mal la volonté du prince. Ainsi celui ou ceux qui ne sont pas d’accord avec le « chef » se donnent comme choix de partir. Ils partent le plus souvent en créant leur propre parti. Partir, c’est peut-être plus facile et plus simple ; d’autres ont tenté la bataille judiciaire, mais le résultat final est toujours presque le même.
L’absence de limitation du nombre des partis politiques encourage les acteurs à ne pas trop forcer la compétition interne pour corriger souvent des problèmes de gouvernance à l’intérieur des formations politique. La conséquence est une sorte de prolifération des formations qui se créent au gré des humeurs et des frustrations. Cette atomisation des partis politiques contente tous ceux qui ont une prétention de leadership, même si ce dernier n’est que de façade. Mais c’est souvent des trophées sans combat et donc sans mérite. Quand on n’a pas appris à se battre démocratiquement au sein de sa formation politique, peut-on le faire convenablement contre d’autres formations politiques de l’arène ? J’en doute ! Mais pire, à quoi doit-on s’attendre de la part des gens qui poussent leurs contradicteurs à la porte pour être vraiment rois à bord ? Rien d’autre qu’une autocratie déguisée !
Sur un autre plan, le manque de sanction des formations politiques fantômes reste un manque à corriger dans le dispositif réglementaire autorisant la création des partis politiques. Tout parti se crée pour la conquête et l’exercice du pouvoir. Qu’importe le niveau d’exercice, (local régional ou national), un parti qui n’arrive pas à présenter de candidat pendant trois scrutins successifs organisés après sa création ne devrait plus bénéficier du bénéfice de son récépissé.
Toutefois la solution réglementaire ne sera pas la seule contrainte qui obligera les acteurs politiques à être plus combatifs au sein de leurs formations et à renoncer à la solution du départ en cas de désaccord. La menace d’un affaiblissement préjudiciable aux acquis du parti peut être une autre contrainte. C’est justement ça le cas de figure l’ADEMA-PASJ. Grande parti vainqueur des premières élections démocratiques, le problème de gouvernance s’est posé à l’ADEMA-PASJ durant les épisodes de 1994, 2000 et 2002 qui ont vu les départs de feu Mamadou Lamine TRAORE fondateur du MIRIA, de Ibrahim Boubacar KEITA pour créer le RPM et de Soumaïla CISSE pour la naissance de l’URD. Si en 1994 la situation n’a pas été ressentie avec grande peine, il n’en a pas été de même pour les deux autres départs qui ont suivi. L’électorat malien n’est pas extensible à l’infini et chaque scission est désormais une menace directe pour le parti.
La crise de leadership au sein de l’ADEMA amorcée depuis 1994 n’a jamais été convenablement gérée. Cette crise se cristallise à l’approche de la désignation d’un candidat pour la présidence de la République. L’on a cru bien faire en initiant des primaires en 2002. L’une des conséquences de l’échec de cette initiative est le départ massif des militants qui ont créé l’URD. En 2012 il y a eu beaucoup de tractations pour avoir un candidat et faute d’élections l’on ne peut préjuger de ce qu’aurait été le niveau de soutien de ceux qui avaient voulu se présenter contre le président du parti.
L’on peut dire que l’absence d’élections n’a fait que reporter les problèmes internes de l’ADEMA-PASJ. Pour les échéances de juillet prochain, un candidat vient d’être investi. Mais ni les conflits post primaires de 2002, ni les hésitations de 2012 n’ont permis à ce parti, qui ne manque pas de cadres compétents, de tirer les leçons de ses errements. Personne ne peut garantir que le parti sortira indemne de cette nième épreuve de primaires mal préparées.
La réalité est qu’il faut se rendre à l’évidence. Le parti n’est pas suffisamment prêt, au stade actuel de notre démocratie pour l’épreuve des primaires. Il y a beaucoup d’efforts internes à faire dans nos formations politiques pour instaurer une bonne gouvernance et pratiquer une démocratie interne avant de parvenir à cette phase. L’avantage de l’ADEMA est devenu une menace perpétuelle sur sa stabilité. La candidature naturelle vaudrait mieux que des primaires qui chaque fois font planer le spectre d’une nouvelle scission au sein du parti.
Ce problème de leadership n’est peut-être pas d’actualité dans les partis qui ont à présent leur principal instigateur en scène. Mais qu’adviendra-t-il de leur sort une fois que ce père fondateur se sera retiré ? Le PDP après le départ de Me Drissa TRAORE n’a pu résister aux multiples vagues de contestation du supposé leader en poste. Parlant de candidat naturel, je ne regarde pas uniquement en direction du sommet du parti, quel qu’il soit. Les organes des partis doivent être dirigés de préférence par des personnes qui ont des mandats d’élus. Cela est une preuve que ceux-ci peuvent mobiliser une partie de l’électorat en plus des militants et faire gagner la formation politique.
Si l’ADEMA veut exploiter son avantage de creuset de leaders potentiels et rendre service au peuple malien, il prendrait des mesures internes pour que désormais son candidat à quelques scrutin que ce soit puisse être désigné avec le moins de contestation possible. Pour cela il procédera à une réforme dans ses textes. Le candidat à la présidentielle se fera sur la base de la préséance au niveau de son Comité Exécutif. Mais tout siège au niveau du CE sera conditionné à un mandat d’élu au niveau national régional, (député, conseiller national) ou niveau régional. Pour ceux qui perdent leurs mandats, ils devront être remplacés aux prochaines élections dans les organes du parti. Pour les candidatures au niveau des députés ou élus locaux, suivant la préséance au niveau des bureaux de section. Et au moins les dix premiers membres des bureaux de sections devraient être des porteurs de mandats d’élus (national ou local). Pour les candidatures au niveau des élections locales suivant la préséance dans la section ou à défaut dans les sous-sections. Au moins les cinq premiers responsables de chaque sous-section devraient être porteurs de mandat d’élus. Ce mécanisme est fondé sur l’occupation de terrain du parti et sur son poids dans l’électorat. Il mettra beaucoup plus le parti en phase avec l’électorat, mais compliquera certes la compétition interne.
Au delà de l’ADEMA la candidature naturelle comme principe est fondé sur une démarche qui instaure une double sélection des animateurs des organes politiques. Le choix des militants en premier lieu et celui de l’électoral en second. Donc les échéances électorales permettent la confirmation ou non des responsables au niveau des organes du parti. Quel que soit le niveau de l’organe, le premier responsable à ce niveau sait qu’il doit amener le parti au meilleur score possible. S’il est incapable, sa sanction sera fondée sur l’échec du parti et un autre prétendant le remplace avant les prochaines échéances. Cela permet au moins de mettre fin à un nombrilisme au sein des formations politiques qui doivent intégrer le fait qu’elles n’existent pas par et pour elles-mêmes.


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